Baresh signifie la
pluie en Urdu.
Ben pour ça, il ne nous a rien manqué !!!!
On prévoit de rentrer vers le 27 ou 28 à Islamabad.
Bus à 11h du matin, en principe, dans 24h on est à Islamabad.
On arrive vers 15h à Gilgit, ensuite tout se détraque.
Nous devons attendre une escorte pour traverser le Diamer en convoi de 6 bus, car l'an dernier, des bandits de grand chemin ont rançonné un car de touristes pour les laisser à poil..
Nous sommes les seuls européens au milieu des pakistanais de Lahore, Karachi, Islamabad.
En attendant l'escorte, tout le monde se disperse, il fait nuit, je me balade et croise deux pakistanais un peu louches qui se roulent un pétard gros comme le doigt. Il m'en proposent, je goûte une taff (=puff en anglais)... pas mauvais.
Ce sont les deux chauffeurs d'un des bus et ils me disent qu'ils conduisent mieux avec ça... OK.
Somnifère, on roule toute la nuit il pleut, pleut, pleut (baresh). On traverse des gués, plusieurs, puis un plus important que les autres, torrentiel, nous stoppe une heure.
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Le tourbillon qui alimente la buse en dessous. |
Puis une voiture tente le coup et passe. Les chauffeurs de bus n'osent pas, on les comprend. Encore 2h d'attente, et le torrent s'apaise un peu. La route a disparu ? Non, juste le goudron et quelques murs en pierre. La structure a tenu. On passe, c'est impressionnant.
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La route est bordée d'enfants, et la marijuana sauvage
qui pousse comme du chiendent, embaume l'atmosphère. |
Le convoi repart, on roule une heure de plus, puis restop, un autre gué. On attend deux heures de plus dans le bus qui maintenant prend l'eau. Il pleut dedans à grosses gouttes.
Ça fait 24h qu'on est partis, on est trempés comme des soupes, on a fait, on en a plein le cul.
On parvient au village de Becham, les bus s'arrêtent ... petit déjeuner sans doute ? Non point, c'est le terminus, ils nous remboursent la moitié du prix du billet et déchargent les bagages.
On voit le fleuve Abasind (qui vient de Swat) en furie, c'est très impressionnant. Tout ce qui se déroule au Pakistan est impressionnant!
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La route est détruite. Sous le parapluie,
deux flics tentent mollement de stopper les gens qui veulent traverser. |
C'est la course pour traverser le pont avant qu'il ne s'effondre. Si on ne passe pas maintenant, on est coincés pour au moins 8 jours. La route s'effondre par pans entiers, c'est énorme, et des vagues d'eau boueuse passent au dessus du pont... On s'élance, de l'eau jusqu'aux chevilles, des embruns nous trempent et nous bousculent, on court comme des dératés... ouf, c'est passé !!! Le vagues sont gigantesques, c'est un raz de marée continu. Il pleut toujours autant, nous sommes trempés.
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L'eau passe encore sous le pont. Quand nous avons traversé, elle commençait a passer par dessus. |
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24 heures plus tard, on ne voit plus le pont. |
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Grosse vague |
En réalité, le pont est toujours là, mais il est
sous l'eau, qui est monté d'au moins deux ou trois mètres.
On voit bien que la rivière a bouffé la route et une partie des rives.
L'arbre au premier plan a disparu, ainsi que la cabane verte, les arbres du fond vont bientôt disparaître.
Ce qu'on ne voit pas ici, c'est que de l'autre coté, à droite sur la photo, l'Indus se comporte de manière analogue et bouffe petit à petit le terrain.
Pour le moment, on loge à l'hotel Taj-Mahal (300Rps=0.3€ par nuit pour une chambre de 3 lits), ou personne ne parle anglais. Sam, un touriste pakistanais se met sous notre protection, et réciproquement.
On passe une bonne nuit, à peu près au sec.
Le lendemain, on fait quelques vidéos, et photos. Il pleut de plus en plus fort. De grosses billes de bois descendent le fleuve et font le bonheur des pakistanais qui prennent des risques insensés pour les récupérer.
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On attend le bois |
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Le bois, toujours |
Les gens du village sont des Pachtouns aux yeux fiévreux, d'apparence plutôt belliqueuse. Ça change radicalement de la vallée du Hunza !
Je vais seul dans le bazar acheter des basket secs, et un instant je me demande si je n'ai pas été un peu imprudent. D'autant qu'on est à coté de Swat, une vallée ou sévissent les talibans, où les accrochages avec l'armée sont nombreux.
Les Pachtouns me lancent des regards sombres et hostiles.
J'apprendrais un peu plus tard de la bouche de Jabbar, je crois, qu'un commando de talibans est récemment venu pour prélever l'impôt et enrôler quelques jeunes à Bicham. Ils sont paraît-il repartis les pieds devant.
Les Pachtouns sont très "rough", limite un peu arriérés, du moins c'est leur réputation : l'équivalent des basques ici. J'ai pas osé prendre de photos.
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Le boulanger à genoux |
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Le four à chapatis, un chapati collé sur la paroi. |
Le boulanger en face de l'hôtel, à peine si j'ai osé lui acheter un chapati le premier jour (5Rps) tellement il semblait hostile.
Le second jour, il m'appelle pour que je vienne me chauffer au coin de son feu... Sympa, ça fait du bien.
Le troisième jour, il me siffle de l'autre coté de la rue, me demande impérativement de venir, m'offre un chapati, un seven-up et un pétard avec la complicité hilare de trois potes à lui : "...et tu bouge pas de là tant que t'as pas fini." Abdurahman est son nom.
Le deuxième jour d'apocalypse, on apprend qu'un avion s'est scratché à Islamabad, qu'un village de 1000 habitant vient d'être rayé de la carte avec la plupart de ses habitants à quelques km d'ici. Les réfugiés arrivent à l'hôtel, il pleut gros comme le poing toute la journée, l'ambiance est sinistre. Je fume un paquet de cigarettes.
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La chambre : sobre, sèche.
Notez le pantalon mouillé qui tente de sécher à la fenêtre |
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Sam, Grey et Rob |
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Ce qui reste de la route de Swat. |
Le troisième jour, la pluis se calme, ils ont construit un foot bridge, petit téléphérique qui traverse la rivière, et rapatrient les plus démunis du bon coté du pont.
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Pont de fortune, mais efficace |
Ils nourrissent les gens de l'autre coté de la rivière en leur jetant des fruits à la main. La route est toujours bloquée vers Islamabad, des informations contradictoires circulent. Je dois impérativement partir demain sinon je rate mon avion.
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Du monde partout |
Dernier jour à Becham. Les militaires ont eu vent de notre présence et sont venus s'enquérir de notre bien-être et de notre sécurité. Nous partons ce matin tôt
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Serrés comme des sardines. |
Encore une matinée à rouler, un pont (Chinese Bridge) à traverser à pied, et nous sommes sur une route praticable.
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Rob sur le Chinese Bridge, au dessus de l'Indus.
Les militaires n'aiment pas qu'on fasse des photos de leur pont, alors j'en fais une. |